Emportés vers Saint Malo, sur le Sillon, au palais du grand large depuis de nombreuses années, cette fois pour fêter la 25e édition du
Festival des Étonnants Voyageurs, nous avons galopé d'une rencontre d'auteur à une table ronde, à un débat ou une dédicace...
Les trois jours ont passé
à la vitesse d'un cheval au galop dans la baie du Mont Saint Michel !
De ces moments intenses,
je vous en ferai voir quelques uns en images mais ne manquer pas d'aller
consulter leur site et peut-être écouter quelques retransmissions. Ce Festival
sait le faire !
Avoir le temps de déjeuner
d'une très bonne galette du "Petit Bey" et pourquoi pas d'une crêpe
"Suzette" et un soir s'offrir un petit dîner au "Palais
d'Asie", une cuisine thaïlandaise délicieuse, Intra-muros.
Bref, je vous le dis,
trois jours qui passèrent trop vite...
Soyez indulgents car je mets
seulement quelques notes que je n'ai pas pris le temps de rédiger !
Avec Lire, qui fêtait ses 40
ans et François Busnel nous
parcourions de notre fauteuil les grands espaces américains (Carnets de route
un documentaire de 52' de 2012) pour suivre à la suite, une rencontre autour de
"Le grand roman américain" avec
comme intervenants Dan O'Brien
(l'éleveur de bisons-écrivain) "Wild idea", Anthony Doerr "Toute la lumière que nous ne pouvons pas voir", Philipp Meyer "Le
fils", Kim Zupan "Les
arpenteurs" et bien sûr François Busnel. L'Amérique et surtout l'Ouest
reste une légende et pourtant les jeunes écrivains, comme Philipp Meyer,
revisitent son histoire et nous offrent des romans forts tandis qu'O'Brien nous
fait vivre au travers de ses écrits l'espace de ces grandes plaines de l'Ouest
où il vit...
Trois romans qui ont un
grand succès cette année !
L'invention du paysage. Du jardin au grand dehors.
{Vous connaissez ma grande passion
pour la nature, la campagne, mon jardin, mon potager, mes fleurs, mes arbres, à
la maison ce ne sont pas les bisons mais les chevaux depuis un quart de siècle...
C'est ainsi que j'ai choisi ce thème.}
Intervenants Dan O'Brien, Pierre Schoentjes, Claude
Eveno.
Ici, il était question de
contrastes, de différents environnements urbains, entre jardins et parcs, et le grand dehors,
les plaines immenses du grand ouest américain sans oublier les terres de Hollande.
Chacun avec sa propre culture, ses souvenirs d'enfance, sa façon d'habiter les
lieux.
O'Brien "Wild idea", dit-il, fait partie humblement de la nature qui
l'entoure, il élève des bisons dans de grands espaces qui règlent sa vie après
avoir créé une entreprise, un ensemble d'écosystème qui lui permet de lutter
contre le grand capitalisme et la destruction de ces espaces grandioses.
Les bisons, icônes de
l'Ouest où il existe encore une parenté entre les indiens et ces gros
mammifères. Mais O'Brien nous rappelle aussi la rudesse, la puissance de la
nature...
Ses livres racontent sa
vie et son lieu de vie ("Wild idea").
Claude Eveno "L'humeur paysagère" nous raconte les jardins, lieux de rêverie, de
méditation de promenade solitaire... Le grand dehors pour les urbains actuels
(sic) !
Le passé culturel, le
monde qui avance, qui change. Le sauvage dans les herbes qui bordent nos
grandes routes et autres périphériques... Les espaces verts urbains source de
beauté face à l'immense, les lignes, les perspectives comme déjà Le Nôtre
savait l'orchestrer, le land-art...
Comme les places publiques
ont souvent disparues ou ont été réduites par un urbanisme galopant, il faut
trouver d'autres endroits de rencontre, de sociabilité et ce choix ne peut être
que politique... La sauvegarde des jardins historiques, la conception des espaces publics...
Pierre Schoentjes "Ce qui a lieu, essai
d'écopoétique", lui, ne se
définissant pas avec la nature, parle plutôt du rapport de l'homme au lieu où
il vit, où il travaille. Comment habiter son environnement ? Un passé humaniste
qui n'est pas du tout le même en Amérique. Le rapport à la campagne ne peut pas
être le même en Europe où l'on parle plus de ruralité, utilisation des sols, de
rendement, dans des espaces mesurés, calculés et d'espace de vie dans la ville...
Les mesures nationales ne suffiront pas pour régler les problèmes de
l'environnement. Comment garder le sentiment de la nature ? C'est souvent à
travers notre culture que nous regardons notre environnement.
Deux mondes différents.
Dans l'un, on fait avec, dans l'autre on invente, on crée des lieux qui nous
raccordent à la nature...
Dommage, Kathleen Jamie "L'œil du
faucon" n'a pas pu assister au débat !
Peindre-Écrire...
L'imagination créatrice
Frankétienne "Chaophonie", le sage de 79
ans qui nous brossa le pouvoir des mots qui peuvent exprimer l'invisible mais
aussi l'énergie du monde et son pari sur l'avenir. Il souligna en particulier
la musique des mots en déclarant que le verbe c'est la vibration.
L'imaginaire comme l'insaisissable font partie de
la totalité des êtres et des choses. Tout se rejoint... Les mots nous échappent
au contraire des couleurs de la peinture. Le rêve a toujours un lien avec la
réalité. A Tahiti, partout, la vie et la mort sont présents. L'imaginaire
contient toutes les réalités. La peur d'écrire, d'assembler des mots en tenant
compte des règles, des contraintes mais c'est pourtant dans l'écriture que l'on
peut rencontrer le monde de tous les possibles.
Murielle Barbery "La vie des elfes", nous
annonça que le livre est une mélodie avec un rythme, un souffle qui peut
nous raconter des mondes invisibles...
J'écris et je ne sais faire que cela. Mes mots
décrivent les autres arts surtout la peinture. Décrire le scintillement...
Le langage de la nature, un enchantement naturel,
est un sas entre le réel et l'imaginaire...
Ses deux héroïnes, Clara et Maria que tout sépare,
pourtant se retrouvent en contact avec le monde des elfes. Les elfes, symbole
du monde de l'art et du mystère devraient avoir des temples japonais, dit-elle,
influence de son séjour au Japon pendant deux années... Il y aura une suite à
cet opus !
Breten Breytenbach "la femme dans le soleil",
répond à Frankétienne en ajoutant que la vibration c'est la conscience, le
mouvement de l'imagination est une éthique. La poésie assemble l'exorcisme,
la danse des mots, la couleur des mots. Elle n'est pas littérature, elle bouge,
elle vibre...
L'invisible ne s'invente pas, on le crée.
L'imaginaire domine, est préexistant dans les rêves...
Le sens des mots pour l'auteur n'est pas
obligatoirement celui du lecteur.
L'écrivain est un passeur. Écrire la poésie avec
conscience et lucidité en soulignant les oppositions et les contradictions. Il
faut se dissoudre derrière son écrit, devenir autre avec ses peurs, ses
frontières et malgré tout percer l'écran...
Hubbert Addad "La condition magique"
affirme qu'il est peintre avant tout, peinture qui lui a permis de parier sur l'infini
et le néant. Mais poète, il est aussi et ses deux formes artistiques se mêlent
et se complètent. C'est une expression de soi à partir d'incertitudes et
d'inquiétudes.
Les champs de l'art sont des espaces de liberté. Il
suggère l'image de la coque de noix de l'imagination sur l'océan sur lequel
nous sommes tous. Soyons des coques de noix pour voguer avec notre imaginaire !
Après la projection du film "Le phare, un
voyage immobile" tourné par Paolo Rumiz (et réalisé par Alessandro
Scillitani) sur une île minuscule, au milieu de l'Adriatique, plantée d'un
phare en son milieu, le débat avait pour
thème "L'esprit des lieux".
Paolo Rumiz avait déjà beaucoup voyagé, des frontières de
l'Europe en remontant les Balkans, en suivant les traces d'Hannibal et le
fleuve Le Pô.
Ayant envie d'ailleurs encore une fois, il s'évade
sur une île, dans un phare et commence le voyage immobile !
Immobile, si l'on veut car il a arpenté l'île de
long en large, pour suivre, les goélands en nombre avec leurs cris, le vent
avec un chant différent à chaque apparition, le bruit assourdissant des tempêtes,
le grésillement des voix, dans toutes les langues méditerranéennes sortant
d'une radio dans le phare où habitent deux gardiens et bien sûr le bruit
incessant de la machinerie du phare qui sans cesse avertit les bateaux avec sa
petite lumière d'une ampoule de 20 watts. Il dira l'importance la voix du
lieu, surtout celle du vent.
"J'avais besoin de me reposer, loin du monde
et pourtant je n'ai pas arrêté de marcher, filmer, de méditer, d'observer,
d'écrire et je me voyais dans ce phare au centre du monde !"
La Méditerranée est une mer plus sérieuse qu'on le
pense, des changements soudains, le vent qui se lève sans prévenir et, vivre
dans le phare comme dans une forteresse a été pour lui une singulière
expérience.
Claude Eveno "L'humeur paysagère" nous parla bien sûr des jardins, lieux qui
peuvent aussi nous aider à vivre ensemble, proches du vivant, de la nature où
la méditation est possible aussi. Malgré que les jardins fassent appel à tous
nos sens (le vent dans les arbres, les oiseaux...), il en est un qui lui semble
important, la vue.
Cédric Gras, nous raconta en quelques mots "ses
trois automnes en une seule année" en voyageant en Russie
d'Extrème-Orient, poussé par "L'hiver aux trousses". Donc pour
lui, l'esprit des lieux c'est en priorité l'importance de la lumière, la
lumière caractéristique de l'automne. L'esprit des lieux est immatériel, c'est
souvent l'esprit littéraire. On parle souvent des maisons qui ont une âme,
l'atmosphère de certains hôtels qui gardent entre leurs murs encore la trace de
personnages anciens...
Quelques prix décernés en
cette année 2015 :
Simone Schwarz-Bart, auteure de "L’ancêtre
en solitude", au Seuil, et l’Américain Philipp Meyer, auteur de "Le
Fils" chez Albin Michel, ont reçu les prix Littérature Monde en langue
française et étrangère.
Le discours de Me Simone Scharz-Bart fut un moment
fort et parfois émouvant, émotion que la présidente, cette année Ananda Devi
témoigna dès le début de la remise des prix et à la suite.
Prix Nicolas-Bouvier à Paolo Rumiz, Le
Phare: Voyage immobile (Hoebecke)
Prix Étonnants Voyageurs à Sylvain Coher, Nord-nord-ouest (Actes
Sud)
Il y en eu d'autres mais je n'ai pas tout suivi !
Un week-end intense mais à chaque fois qui nous fait voyager avec jubilation...